Bibliographie : Zhou Daguan en espagnol

Parmi les livres que j’ai récemment reçus, se trouve la traduction en espagnol des fameuses Mémoires sur les coutumes du Cambodge du chinois Zhou Daguan (voir ici le billet que j’avais consacré à la traduction française, réalisée par Paul Pelliot, de cet ouvrage).
La version espagnole, due à Astrid Haardt, est intitulée Vida y costumbres de Camboya (Vie et coutumes du Cambodge), sous-titrée « Relato del viaje de Zhou Daguan a Angkor » : récit du voyage de Zhou Daguan à Angkor). L’effort est louable, car il permet aux hispanophones d’avoir accès à ce livre, essentiel pour l’étude du Cambodge de la fin du XIIIe siècle. C’est à peu près le seul compliment que j’ai à faire de cette traduction.
La Chilienne Astrid Haardt se présente comme une passionnée d’histoire. Elle « a consacré une grande partie de sa vie professionnelle à l’étude de l’histoire de différentes cultures dans le monde », explique la quatrième de couverture. Je n’en sais pas plus, mais son introduction du texte espagnol de Zhou Daguan me laisse douter de sa qualité d’historienne.
Le premier souci de cette traduction, est qu’elle s’appuie non pas sur le texte chinois, mais sur la traduction anglaise qu’en a proposée Peter Harris sous le titre de A Record of Cambodia – The Land and its People, publiée en 2007 (j’en avais parlé ici). « Traduttore, traditore », disent les Italiens : une traduction est toujours, plus ou moins, une trahison. Alors que dire de la traduction d’une traduction…
Le deuxième souci est que la traduction de Peter Harris a été réalisée pour le grand public, et n’est en rien le fruit d’un long et patient travail de recherche scientifique. Cette version de Harris est certes agréable à lire, mais elle est très, très loin, d’être exempte de reproches. Or, Astrid Haardt prend pour argent comptant à la fois le texte anglais de Peter Harris, qu’elle a traduit intégralement, et ses notes, qui sont aussi traduites pour la plupart, sans jamais exercer le moindre regard critique.
Enfin, Astrid Haardt est douée d’une imagination débordante, et d’une naïveté désarmante. Elle n’hésite par exemple pas à affirmer (page 17 de sa présentation du texte, dans la partie « Les sources »), que le texte de Zhou Daguan est écrit « au présent » (je suis heureux de découvrir après plus de 30 ans d’étude de la langue de Confucius que les verbes chinois se conjuguent), et que le style de l’auteur des Mémoires est agréable (« ameno ») et que le texte est en chinois parlé (« muy coloquial »), ce qui en rend la lecture agréable, et qui permet à l’ouvrage de captiver l’auteur par la simplicité du texte… Bigre ! Je me demande bien pourquoi quelqu’un comme Xia Nai, auteur d’une édition en chinois commentée, qui fait autorité, publiée en 2000, a cru bon de consacrer plus de 300 pages de notes à un ouvrage dont le texte tient en vingt pages…
Précisons que le texte de Zhou Daguan est, comme tous les textes du genre de l’époque des Yuan, rédigé en chinois classique, qu’il n’est jamais limpide, et qu’en outre tous les commentateurs sérieux s’accordent pour dire qu’il est assez bancal.
Pour ne pas terminer ce billet sur une note négative, j’admets tout de même que la bibliographie donnée par la traductrice contient quelques titres intéressants.
Vida y Costumbres de Camboya a été publié par la traductrice elle-même (ISBN : 9781478384496).
Voici la couverture de mon exemplaire :
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