Tourisme : Le stégosaure du Ta Prohm

J’ai acquis il y a quelques jours un superbe ouvrage de Micheal Freeman et Claude Jacques, intitulé Angkor, Cité Khmère. Je ne l’ai pas encore lu, mais je l’ai feuilleté, et ai trouvé page 143 une photographie de ce que l’on a appelé le « dinosaure d’Angkor », désormais fameux.
J’avais entendu parler de ce bas-relief dont certains prétendent qu’ils représentent un stégosaure, situé dans un cartouche gravé sur un pilastre de la tour ouest de l’entrée de la troisième enceinte du temple Ta Prohm, sur le site archéologique d’Angkor, aussi m’étais-je mis à la recherche du saurien antédiluvien à l’occasion de mon dernier passage sur le site (mi-juin 2012). Ma recherche a abouti, puisque j’ai pu prendre quelques photos de la bête en question.
Il s’agit d’un bas-relief inscrit dans un cercle, qui fait partie d’une série de cercles dans lesquels ont été sculptés des animaux fabuleux ou familiers. Un coup d’œil rapide laisse effectivement penser que l’on est là en présence de l’un de ces dinosaures que nous appelons stégosaure.
Des créationnistes se sont emparés de ce bas-relief pour appuyer leur théorie selon laquelle l’humanité (et tout ce qui va avec) aurait été créée par Dieu il y a six-mille ans, et présentent la bestiole comme une preuve démontrant que les hommes et les dinosaures ont coexisté. Pour le détail de leur argumentation, je vous invite à lire l’article en anglais intitulé « Dinosaurs in ancient Cambodian temple – Amazing evidence that dinosaurs and human coexisted » (Des dinosaures dans un ancien temple cambodgien – une preuve stupéfiante que dinosaures et humains ont coexisté) qui se trouve ici.
Les auteurs de cet article expliquent que les sculpteurs khmers ont uniquement représenté des animaux qu’ils avaient devant les yeux, et que puisqu’on reconnaît parfaitement les singes, perroquets et autres buffles, il paraît évident que c’est un stégosaure vivant qui leur a servi de modèle pour ce bas-relief. Cette argumentation m’amuse en peu, d’autant plus que le même article donne une photo d’un bas-relief d’un autre temple, le Banteay srei, celui, fameux également, du dieu hindou Indra monté sur Airâvata, son éléphant à trois têtes (dont j’ai donné une photo ici). Si l’on suit bien l’argumentation des créationnistes, il faut en conclure que les sculpteurs du Banteay srei ont eu sous les yeux un éléphant à trois têtes pour réaliser leur œuvre…
Cette théorie créationniste a été réfutée par des spécialistes en août 2010 dans le n°394 de la revue Pour la science. Ces scientifiques voient eux dans le bas-relief, dont l’existence n’est pas contestée, la représentation d’un buffle, les « plaques » osseuses couvrant le dos de la bête n’étant en réalité qu’un motif décoratif souvent rencontré à Angkor, et constitué de boutons et de pétales de lotus. (Voir ici)
Je laisse à chacun se faire son opinion. En tout cas, si vous allez au Ta Prohm, prenez donc une photo du monstre, ne serait-ce que pour contribuer à l’épaississement du voile de mystère qui couvre l’Extrême-Orient insondable…
(Les deux photos ci-dessous ont été prises par moi-même, khmerologue en chef, le 17 juin 2012.)
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2 commentaires pour Tourisme : Le stégosaure du Ta Prohm

  1. Rhealsan dit :

    est-il possible de reprendre cet article pour une publication
    svp me contacter

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